Chroniques heureuses, bibliques et nordiques.

Lu. Flow. De Mihaly Csiksentmihalyi.

Il est des livres sur lesquels on tombe un peu par hasard et qui finalement vous amrquent bien plus que nombre d'autres choisis pour des raisons bien plus claires. C'est pour moi le cas avec cet ouvrage d'un auteur au nom improbable et dans un genre que je ne lis pas forcément beaucoup : de la vulgarisation en sciences humaines, plus spécifiquement en psychologie (et il se retrouve en développement personnel en édition française, ce qui se tient, mais qui m'en aurait sans doute éloigné, comme quoi...). La question centrale sur laquelle travaille l'auteur, et ce depuis un paquet d'années, et avec des résultats et des méthodologies reprises dans le monde entier, est : qu'est ce que c'est que le bonheur, et, de manière plus opératoire, dans quel type d'activités le ressent-on le mieux et le plus. A partir donc de protocoles assez lourds, mais qui donnent pour quelqu'un comme moi du poids au discours, il analyse donc assez finement les caractéristiques des activités qui collent et en tire un modèle cohérent. Ce n'est pas révolutionnaire dans le contenu mais c'est posé de manière claire, argumentée, et solide. Et le volume de données dont il dispose lui permet d'affiner et de donner des exemples dans tous les types d'activités, et d'extraire donc un mode de fonctionnement, une manière d'aborder les situations, qui est universel (des activités qui présentent un challenge, mais à la hauteur des compétences sollicitées, avec un feedback et un minimum de sentiment de contrôle, auto-déterminées, etc.). Et qui, même si ce n'est pas le propos central de cet ouvrage, ouvre de vastes avenues de réflexion sur sa propre manière de vivre, d'aborder les choses et de comment l'orienter pour profiter plus de un peu tout et vivre mieux. Sans révolutionner le monde, comme je disais, mais avec enfin un regard clair sur ces questions complètement fondamentales. Ca semble peut-être un peu flou, comme ça, mais je ne veux pas faire un résumé à la hache non plus du contenu. C'est vraiment un livre dont la lecture m'a marqué profondément, et sans doute de manière largement durable. Un vrai livre pour se poser des questions fondamentales donc, mais avec une clarté et une honnêteté d'approche et de méthode que je trouve complètement convaincantes.

NB : En français, c'est chez Pocket évolution, sous le titre Vivre, et je vous encourage à passer outre la collection un peu kitsch, le contenu en vaut la peine.


BD. Le voyage des pères. De David Ratte.

Remarquable surprise que cet album qui me fut offert pour mon Nouelle. Avec sa couverture assez standard, je ne l'avais même pas feuilleté auparavant, alors que je l'avais croisé en librairie. J'avais bien tort. Le propos de fonds est le suivant : Jonas, marin sur le Lac de Tibériade, voit ses deux fils partir avec un certain Jésus, débarqué un beau matin. Il se dit qu'il vont revenir, or non. Du coup, il n'a plus personne pour la pêche et sa femme s'inquiète au point de l'envoyer les chercher. C'est donc ensuite son périple, en compagnie des pères d'autres apotres, qu'on suit. Et la finesse le dispute à la drolerie. C'est écrit de manière remarquable, autant sur le fonds que sur les dialogues. Je dirais même particulièrement sur les dialogues, qui sont vivants, légers et souvent hilarants. Et malgré le thème potentiellement casse-gueule, nul écueil, ni dans un sens ni dans l'autre. Comme d'autre part, je trouve le dessin doux et vraiment joli, et la mise en couleur chaleureuse, je ne vois pas que vous dire d'autres que de le lire. Vite. Non, sérieusement, ça faisait longtemps que je n'avais pas lu une BD aussi bien tournée et entousiasmante, et aussi peu enfermée dans des codes de BD traditionnelles non plus. Bref, du très bon.


Lu. Les Royaumes du Nord. De Philip Pullman.

Tome 1 : La boussole d'Or.

Puisqu'on en entend parler partout à la télé et sur les murs, je suis allé jeter un oeil à ce dont il s'agissait directement. Sur une base qui ressemble beaucoup à du roman fantastique pour ados de facture classique, Pullman fait en fait preuve d'une originalité et d'un talent indéniable. Tout d'abord, le monde dans lequel il écrit est suffisament riche et cohérent pour intriguer : la technologie est présente, mais il s'agit de théologie expérimentale, saupoudrée de dirigeables, machines à vapeur et autres steampunkeries, sans parler des ours en armure. Ensuite, son approche narrative est proche du conte et ne perds pas de temps dans des descriptions inutiles. Enfin, l'héroine, bien que élue pour sauver le monde, est vivante et drole. Seul défaut en ce qui me concerne pour ce premier tome, on est encore largement dans l'ignorance des grands plans qui sous-tendent le scénario même si il est évident qu'ils existent. Le style global fonctionnera sans doute encore mieux avec des ados mais ça reste bien agréable.

Tome 2 : Le poignard subtil.

Dans ce deuxième tome, on rentre enfin de plein pied dans le scénario, on voyage de monde en monde et on rencontre des personnages qui expliquent un peu où ça va. Pas complètement, mais on commence à saisir que la place de l'église/magistérium est centrale au propos ainsi que la relation au divin, mais pas dans une perspective niaise ou primaire comme c'est trop souvent le cas dans ce type d'univers. Bon, on introduit également le second personnage principal, que je ne trouve pas fascinant, mais j'ai plus trop l'age de m'identifier non plus, c'est surtout ça parce que objectvement, il est bien. Et les deux personnages principaux fonctionnent bien ensemble également. Plus dense que le premier, c'est un tôme qui m'a beaucoup plu.

Tome 3 : Le miroir d'ambre.

Je vais essayer de parler de la fin sans en révéler trop mais je ne promets pas de ne rien révéler du tout. De fait, c'est le tôme de la grande résolution, et on ne peut pas faire tellement plus grand comme thématique de fond : la place d'un Dieu créateur et de l'humain, le péché originel, l'indépendance de la destinée humaine. Et tout cela est traité avec une perspective qui me satisfait complètement, fine, équilibrée, humaniste. Et gros budget aussi, parce qu'il se passe de gros gros trucs. Maintenant, ce qui est amusant, c'est que ces grandes luttes sont vues par le biais des personnages principaux, qui ont douze et ne sont donc pas en première ligne épée à la main. Du coup, certains passages qu'on aurait attendus grandioses et longs passent rapidement et on s'intéresse plus aux personnages et à leur évolution, ce qui est finalement une plaisante surprise. Accessoirement, la fin des personnages principaux n'est pas non plus clichée, facile et guimauve alors qu'elle aurait pu, elle est touchante et courageuse.

Au final, une série bien écrite qui se distingue surtout par ses choix de thématiques, profonds et intelligents, et surtout en opposition franche et rafraichissante à la majorité des clichés du genre. Je vous invite à y jeter un oeil, pour vous ou pour des ados de votre connaissance.


Ecouté. The Best of. The best band you never heard in your life. De Frank Zappa.

Bon, je me suis remis à écouter du Zappa tant et plus. Du coup, je me suis dit que j'allais vous parler de deux de ses albums avec Best dans le type, ça a des chances d'être vendeur. Zappa est un de mes vrais héros de la musique. D'abord parce qu'il y a tellement d'idées et de variations dans ce qu'il compose qu'on peut le réécouter beaucoup beaucoup en étant encore et encore surpris. Ensuite parce qu'il a de l'humour, dans ses parols autant que dans sa musique, et que c'est assez rare pour faire vraiment plaisir, surtout à ce niveau d'exigence musicale. Enfin parce que quand même, beaucoup de ses chansons sont simplement prenantes et belles, en plus du reste. Du coup, en première approche, je vous conseille The Best Of (version UK si vous avez le choix) qui présente l'inconvénient d'être une sélection assez incohérente (mais sur 40 albums, il est difficile de faire autrement) mais de très bonne qualité. On y retrouve quelques unes des chansons classiques de Zappa, et elles ont de quoi, tout en ayant l'avantage d'être assez facilement abordables. Je veux dire par là que ce sont des morceaux pas trop long et sur des constructions repérables. Ensuite, si vous avez envie d'un peu plus d'originalité et de cohérence, le Live sus-mentionné est un vrai bonheur d'inventivité, d'improvisations, de drolerie et de talent. Maintenant, c'est aussi pas que des chansons de format normal, et avec un son et des variations plus typées années 70. Vraiment, essayez si vous en avez l'occasion, moi ça reste un de mes héros.


Vu. Heroes. Saison 2, première moitié.

Alors juste quelques mots rapides parce que j'ai regardé ce début de saison de manière également rapide, en arrière-plan, pendant que je travaillais. J'avais hésité, ayant peur d'être déçu (et ayant été un peu déçu par le bouclage de la saison 1 également). Je peux pas dire que j'ai été déçu : c'est tout comme la première. Des flashbacks, une grande menace, des révélations progressives, des gens qui ont du mal avec leurs pouvoirs. Tout pareil. Avec du suspense, hein, je dis pas, et on apprends des choses sur les vieux de la génération précédente. Mais ça sent la formule qui tourne voire qui ronronne. Le boulot est bien fait, je peux pas vraiment dire de mal, mais ça n'a plus la fraicheur qui faisait pour la différence pendant la saison 1.