Chroniques chrétiennes et tantriques des petits ruisseaux.

Lu. La dernière tentation du Christ. De Nikos Kazantzaki.

Kazantsaki est un auteur qui se déguste. Alors un par an, pour l'été, je trouve ça approprié. Pour autant, il n'a rien des romans estivaux habituels, tout au contraire. Il écrit avec une densité et une force qui me laissent toujours aussi impressionné. Il se trouve en plus que le sujet est ici assez fort, puisqu'il s'agit de la vie du Christ, et plus spécifiquement de la fin. Et Kazantzaki parle de tentation, principalement, mais pas uniquement ou spécifiquement de tentation religieuse, il parle de la tentation de la facilité, de la tentation de vivre une vie d'homme et non une vie d'abstraction, et au-delà du Christ lui-même, dont il fait un portrait très fort et très émouvant, il parle de la quète de sens de toute vie. J'ai retrouvé la relation très conflictuelle et brutale que Kazantzaki a au divin avec un certain bonheur, même si ce n'est toujours pas quelque chose que je partage, parce qu'elle est forte et qu'elle questionne de manière incessante et exigeante la vie autant que la religion. Enfin, le plus, dans le cas présent, c'est que j'ai lu ça pas si longtemps après l'Evangile de Pilate d'Eric-Emmanuel Schmitt, et que ça m'a beaucoup amusé de comparer les deux. J'ai aimé les deux mais autant Schmitt est léger et joli, autant sur le fond que la forme (et c'est un compliment), autant Kazantzaki est dense et beaucoup plus inscrit dans le conflit et la tension. Et ca donne un éclairage d'autant plus riche aux thématiques qu'ils abordent tous les deux. Et dans les deux cas, Judas est pasionnant, mais plus encore chez Kazantzaki. Ensuite, ce n'est pas une lexture légère et rapide, mais n'empèche, c'est toujours un auteur qui m'impressionne fortement.


Lu. Vie et mort de la jeune fille blonde. De Philippe Jaenada.

Je peux dire que je suis assidu de Jaenada puisque je n'en ai raté aucun. Maintenant, malheureusement, avec le temps, mon goût pour ce qu'il écrit diminue. Ou alors il baisse, mais je pense vraiment que c'est moi. Il écrit toujours d'une manière que je trouve jolie et amusante, avec un style (plein de parenthèses (à un point que vous n'imaginez pas forcément (promis))) que j'aime vraiment bien. Maintenant, comme à coté, le fond de ce qu'il raconte me passionne de moins en moins, c'est un peu dommage. Là, pour le coup, avec un personnage qui est plus ou moins toujours le même, on se retrouve lancé sur la piste d'un souvenir d'enfance après une soirée chargée dans les sphères branchées parisiennes. Et ca prends pas si mal, c'est amusant et on arrive à rentrer parfois dans les interrogations du personnage. Mais parfois seulement, et comme la fin, comme souvent chez Jaenada, n'est pas complètement satisfaisante (et volontairement, hein, ce qui ne manque pas complèment d'intérèt à tous les coups mais là, pour moi, un peu), j'ai eu un peu une impression de comme d'hab. Donc oui, mais bon, ça m'a pas non plus entousiasmé tant que ça.


Lu. Tantra. De Daniel Odier.

Tantra n'est pas une plongée dans des orgies sans fin au fond de l'himalaya, je vous le dis tout de suite. Il s'agit au contraire du récit d'une initiation, au tantrisme shivaïte, qui est avant tout spirituelle. Ce qui m'a du coup permis de découvrir ce qu'était la tantrisme réellement, puisque j'en avais surtout une idée clichée évoquée ci-dessus. Et ca m'a beaucoup plu. C'est raconté avec simplicité, ce qui est en parfaite adéquation avec le fond. Ce qui m'a beaucoup plu, c'est la dimension holiste du tantrisme, qui veut intégrer les aspects positifs et négatifs de l'humain, et qui refuse également l'isolement monastique, qui prétends une intégration à la vie normale et quotidienne. Fondamentalement, un certain nombre de points m'ont fait penser au Taoisme, ce qui est très positif. Ca n'en a pas forcément la poésie, en tout cas dans la forme présentée ici, mais c'est beaucoup plus facile à aborder et plus explicite pour poser en partie des questions similaires. Et au final, oui, il y a aussi une dimension sexuelle, mais qui pour le coup est plus une expression du reste des enseignements qu'une fin en soi. C'est au final un ouvrage que j'ai trouvé passionnant et qui me redonne envie de me plonger notamment dans un certain nombre de textes taoistes et assimilés.


Lu (BD). Les petits ruisseaux. De Pascal Rabaté.

Pascal Rabaté vous est peut-être inconnu mais il fait des BDs splendides et très fines. Son dernier opus, intitulé Les petits ruisseaux, en est un splendide exemple, à contre-courant de beaucoup de choses de la BD contemporaine, autant dans le format que le thème. En plus, j'aime vraiment bien son dessin, lui aussi très fin et délicat mais je vous laisserais juger plus directement de si ca vous plait ou non. Pour ce qui est de l'histoire, il s'agit surtout de vieillesse et de vie, autant dire que ça laissera peu de gens indifférents. Je ne veux pas trop déflorer l'histoire mais disons qu'elle suit les tribulations d'un vieux pêcheur qui va se trouver contraint de se questionner sur ce qui lui reste de vie et ce qu'il peut avoir envie d'en faire. Et Rabaté ose des moments droles, des moments totalement inattendus qui auraient put être malvenus ou maladroits mais qui fonctionnent parfaitement à force de finesse et de tendresse. Bref, c'est une petite merveille que vous devriez au moins feuilleter en bibliothèque.


Ecouté. Live Injection. Du Watcha Clan.

Il y a, comme ça, de temps en temps, des groupes que je découvre au détour d'un trajet en voiture ou d'un autre aléa. Et Watcha Clan m'a accroché dès le départ, ce qui fait que j'ai acheté, j'ai testé et j'ai bien aimé. Il s'agit ici d'un live, et donc d'un son moins lissé et plus bordelique (d'autant plus qu'ils sont apparemment un peu nombreux sur scène) mais aussi d'une énergie plus visible et débordante. Et c'est d'abord ça qui me plait, c'est du hip-hop plein de pèche et de rythme, qui part parfois dans tous les sens, mais bien. Par la-dessus, des chanteurs, dont une chanteuse, avec de très belles voix, là aussi plein d'énergie, et des textes que je trouve très réussi (dont un érotique, exercice difficile s'il en est, mais splendidement mené) et souvent entrainant. Et ils font aussi l'éloge de l'éducation, c'est des gens bien. Une très bonne surprise donc, que je vous conseille pour peu que le style puisse vous plaire un peu.