Chroniques pétrifiées, cérébrales et pouêtiques.



Lu. Stone Baby. De Joolz Denby.

Je vous avais déjà parlé de Joolz pour sa poésie, notamment en spoken word, et certains de ses romans, mais jusque là uniquement disponibles en anglais. Or, bonne nouvelle, son premier roman vient d'être traduit et édité en français, même si il garde son titre d'origine. Il est classé comme thriller, dans une collection policière, ce qui, sans être complètement faux, est un peu trompeur. Parce qu'il n'y a pas vraiment de mystère quant au fait qu'il s'est passé des choses affreuses, ni par qui elles ont été faites, c'est évoqué, sans détails cependant, dès le début. Et c'est en fait l'entourage du tueur/monstre qu'on va suivre, sa copine et la meilleure amie de cette dernière, leur relation, leur vie, leurs difficultés et questionnements. Ce qui est abordé avec beaucoup de finesse et des réflexions que j'ai trouvées très touchantes et juste, autant dans leur identité que leurs relations au tueur, dont on découvre petit à petit pourquoi et comment il a pu entrer et rester dans leur vie, ce qui fait largement froid dans le dos, mais en restant très réaliste et du coup d'autant plus inquiétant et traumatisant. Parce que oui, c'est quand même un bouquin qui fait bien froid dans le dos, et ce principalement sur des questions de psychologie et de relations humaines. Outre cet argument central, j'ai aussi apprécié que tout ça se déroule dans le milieu alternatif du nord des iles britanniques, artistes, gays, queers, etc, et ce décrit de manière très humaine et pas du tout sensationnaliste (bon, quand on connait l'auteuse, on n'est pas surpris, mais je trouve ça appréciable cependant). Au final, un bon roman d'horreur « quotidienne » (avec quand même des choses horribles, mais qui servent de toile de fond, ce n'est pas ça qui est décrit et suivi), réaliste et inquiétant, qui remue les tripes et donne une bonne idée de ce que Joolz sait faire, même si ce n'est sans doute pas son meilleur non plus.


Lu. Métronome. De Lorant Deutsch.

Lorant Deutsch aime l'histoire et il adore Paris. Il propose donc ici une histoire de Paris rythmée, mais de manière parfois un peu artificielle, par certains arrêts de métro parisiens. Outre que je m'attendais à ce que l'aspect métro soit plus important et structurant, déception finalement sans grande importance, il s'agit d'un bouquin d'histoire léger et agréable, donnant une vision très parisiano-centrique mais bien documentée de l'histoire de France. L'aspect parisien de l'ensemble n'est finalement pas très gênant, en tout cas pour moi, puisque c'est bien ce qui est annoncé dès le départ. Pour des lecteurs sans grande connaissance de l'histoire de France, ça peut sans doute donner une idée un déformée de certains évènements, mais là encore, l'auteur ne prétends pas le contraire, c'est l'histoire de Paris qui l'intéresse, et il ne raconte des portions de l'histoire de France que pour parler de la place de Paris dans celle-ci. C'est agréable à lire, si ce n'est, pour un non-parisien, les passages de description des rues et itinéraires, qui ne fonctionneraient qu'en lisant le livre en se promenant dans les rues en question puisque je ne vois pour un bonne partie d'entre elle pas du tout à quoi elles ressemblent. Quant à l'aspect historique, c'est une bonne synthèse des origines à aujourd'hui, par un amoureux, ce qui est très plaisant. Bon, personnellement, je trouve ça toujours un peu frustrant de ne pas aller dans les détails sur les périodes qui m'intéressent le plus, mais c'est inévitable sur ce type de format. Au final, une lecture très agréable et prenante pour tout ceux que Paris intéresse, qui peut servir de rappel synthétique des grands moments de l'histoire ou de ballade avec un point de vue spécifique.


Lu. Voyage au-delà de mon cerveau. De Jill Bolte Taylor.

Jill Bolte Taylor était neuro-anatomiste, chercheuse et militante pour le soin des maladies mentales et leur étude, quand, à 37 ans, elle a subi un AVC. Et sa première réaction a presque été : « génial ! Je vais pouvoir comprendre de l'intérieur comment ça marche ! ». Bon, pas tout à fait, mais pas loin, et c'est pas loin non plus du ton du livre. Livre qu'elle a donc écrit huit ans après, une fois complètement rétablie, et même mieux que ça. En effet, au-delà d'une description de l'intérieur de ce qu'elle a vécu, décrit avec une description très professionnelle de ce à quoi ça correspondait médicalement (puisque c'est son métier justement), qui est déjà en soit passionnante, ce sont les enseignements qu'elle en tire sur le fonctionnement de son cerveau et sa capacité à se remettre de dommages importants qui ont pour moi rendu la lecture de ce livre des plus prenantes et marquantes. En effet, l'hémorragie a touché uniquement son cerveau gauche, lui ôtant ses capacités de compréhension et d'expression verbales, mais aussi une part spécifique de sa « conscience », la petite voix qui commente le quotidien, la part la plus « rationnelle », la plongeant dans un fonctionnement principalement lié à son cerveau droit, qui est tout à fait fascinant en soi mais aussi riche d'enseignements. D'autant plus qu'ensuite, lors de sa rééducation, très consciente de ce qui se passe, elle n'essaie pas de revenir à son fonctionnement précédent, mais de conserver certaines des découvertes faites et de trouver un autre équilibre entre ces deux manières de fonctionner liées aux deux hémisphères cérébrales. Et il y a là de quoi faire réfléchir tout le monde sur son propre fonctionnement, sur l'emprise consciente qu'on peut avoir sur cet équilibre et nos manières de fonctionner en termes de modes de pensée et d'activation de circuits mentaux, notamment émotionnels. Des réflexions et points de vue sur le fonctionnement du cerveau tout à fait passionnants donc, dans un ouvrage qui plus est bien documenté et touchant, avec de plus des conseils et pistes pour mieux accompagner les victimes d'AVC. Vraiment une lecture à recommander.

Pour ceux qui ont envie de se faire une petite idée et qui comprennent l'anglais, une intervention de l'auteure résumant une partie de son propos :

http://www.ted.com/talks/jill_bolte_taylor_s_powerful_stroke_of_insight.html


Joué. Cyrano. De Angèle et Ludovic Maublanc.

Cyrano est un jeu dont on se dit qu'il peu se jouer tout aussi bien avec des bouts de papier sans rien acheter, et c'est effectivement le cas, mais qui malgré tout dispose d'un matériel et d'astuces de règles qui justifie l'achat, d'autant que c'est un vrai plaisir. Il s'agit d'un jeu de poésie où l'accent est lis sur le fait de ne pas se prendre au sérieux. Et ça marche franchement bien même si je ne vous le conseillerais pas forcément avec des gens très très timides ou très mal à l'aise avec l'écrit et le verbe. Le principe : à chaque tour, chaque joueur compose un poème de quatre lignes, sur un thème imposé, avec deux lignes finissant par chacune des deux rimes imposées. Pas de contraintes de pieds, de rimes croisées ou quoi que ce soit d'élaboré. Et on ne sera pas jugé sur la qualité de poèmes : on marque des points en utilisant pour les rimes des mots que personne d'autre n'a utilisé, et ensuite en votant pour le poème pour lequel voteront le plus de joueurs. Plus que de voter pour le meilleur poème à son goût on vote donc plutôt pour celui qui a le plus faire rire, parler, bref : est le plus sorti du lot. Avec une table de joueurs de bonne humeur, on en vient très vite à faire des poèmes caricaturaux, ou complètement idiots, sans se stresser. Bien sur, avec des joueurs un peu créatifs, c'est mieux, mais le fait de faire des poèmes volontairement mauvais marche aussi assez bien dans un certain nombre de cas. Et, comme je le disais, le matériel est joli et donne envie de jouer, même si la colle du support en carton est un eu merdique et si vous manquerez de feuilles de score si vous jouez beaucoup (mais ça ne vous empêchera pas de jouer, ce sera juste moins pratique de compter les points). Un très bon jeu de soirée en groupe, de détente sans stratégie, sans règles compliquées, et avec vraiment de bonnes opportunités de rigolade.


Joué. Buzz It. De Patrick Scharnitzky, Reiner Knizia, René-Jacques Mayer

Dans la série Party Games, Buzz It est un tout petit jeu, rapide, pour raconter des conneries très vite, et potentiellement avec un grand nombre de joueurs. Maintenant, ce n'est pas un jeu auquel jouer pendant des heures non plus, ça fait une bonne introduction ou conclusion de soirée détendue surtout. Un joueur est buzz master, avec un timer électronique (de 5 ou 8 secondes selon votre envie), et lance un thème, idiot ou non : peut s'introduire, passe par la fenêtre, ville moche, pays d'amérique du sud, etc. Le joueur suivant a moins de 5 ou 8 secondes pour donner une réponse qui satisfait le buzz master, qui relance alors le timer et passe au joueur suivant, sur le même thème. Quand un joueur ne donne pas de réponse, ou pas de réponse satisfaisante, il perds la manche et récupère la carte (celui qui en a le plus en fin de partie a perdu). Pas compliqué donc, et qui fonctionne bien comme petit jeu rapide. Là où ça devient vraiment rigolo, c'est avec des thèmes stupides et des gens qui ont envie d'essayer de raconter n'importe quoi, auquel cas c'est tout de suite beaucoup mieux. Mais ça peut s'épuiser quand même assez vite. Disons qu'avec des gens qui ont envie de raconter n'importe quoi, c'est un bon support très agréable, sinon c'est un party game correct sans vraiment plus pour un temps de jeu pas trop long.


Mangé. Goman Etsu, 11 rue Lanterne, 69001 LYON.

Je pensais qu'il avait disparu, puisque je n'y avais pas remis les pieds depuis des années, mais non : un restaurant japonais authentique, à Lyon, et qui ne fait pas de sushis, mais des Okonomiyaki. Les Okonomiyaki sont des sortes de galettes/crèpes, nourriture plutôt populaire de la région d'Osaka, recouvertes de délicieuses sauces en partie sucrée (de loin apparentées à celles des brochettes Yakitori), dans lesquelles, outre des légumes et de l'oeuf, on trouve une viande ou un poisson (voire plusieurs). Accessoirement, l'Okonomiyaki bouge quand on vous la sert (mais elle n'est pas vivante pour autant) : détail très amusant que je vous laisserais découvrir directement. Et c'est très très bon. Goman Etsu est donc un restaurant d'Okonomiyaki, c'est le seul plat chaud, que vous pourrez consommer seul ou dans un menu comprenant une entrée et un dessert. Les entrées sont très bien, avec des choses classiques et très bonnes et d'autres plus bizarres (le sushi Inari, qui n'a rien d'un sushi classique, si ce n'est qu'il y a du riz). Et les desserts... en fait, je n'ai gouté que les glaces maisons, parce qu'elles sont tellement bonnes que je me refuse à prendre autre choses, particulièrement les glaces au thé vert, très bonne, et au fromage blanc, vraiment exceptionnelle. Et en plus de tout ça, c'est un joli petit resto sympa et accueillant, et pas bien cher. Donc oui, allez-y :)