Chroniques hétéroclites, retorses et ludiques.
Lu. Les Miscellanées de M. Schott.
Les miscellanées sont à la mode, on les voit partout dans
les librairies. Et il y a de quoi, c'est un livre merveilleux. Au sens
premier du terme, il est plein de merveilles. C'est un recueil
d'informations triviales, sans liens les unes avec les autres, mais
toutes savoureuses et souvent incroyables. De petits paragraphes
dépassant rarement la demi-page vous apprennent merveille
après merveille : les morts étranges des rois birmans
(dans lesquelles l'éléphant apparait souvent), les
fournissuers officiels de la reine d'angleterre, les livres de la
bible, les proverbes météorologiques, les règles
de duel en Irlande au dix-huitième siècle, et tant
d'autres découvertes inimaginables. C'est un livre dont on sort
en se disant qu'on vit quand même dans un drôle de monde,
au propre comme au figuré. Je vous conseille très
vivement ce voyage dans le bizarre et l'édifiant. (Et en
complément, je vous invite aussi à essayer de mettre la
page d'accueil de wikipedia comme page de démarrage de votre
navigateur, la sélection est moins savoureuse mais plus
hétéroclite et renouvelée chaque jour).
Lu. A feast for crows. De George R. R. Martin.
Les très longues séries ont à mes yeux un grand
avantage et un grand désavantage. Elles permettent de se plonger
complètement dans un univers, de s'attacher aux personnages et
de suivre des intrigues complexes, mais elles demandent aussi à
être lues sans trop d'interruptions faute d'en oublier la
moitié d'un tome à l'autre. Ce nouveau tome,
moitié de transition entre deux trilogies (c'est-à-dire
que le tome prévu étant trop gros, on a droit pour
l'isntant à seulement la moitié), du Trône de Fer,
en est l'exemple parfait. Oui, on retrouve plein de personnages qu'on
aime bien (mais seulement la moitié, le choix ayant
été fait de couper comme ça plutot que
chronologiquement, ce que je trouve plutot bienvenu), qui
évoluent, font leurs petites histoires et avancent, mais depuis
le temps que j'ai lu le précédent (lors de sa sortie en
anglais), j'ai beaucoup oublié les finesses et je rate pas mal
de choses (du genre « Mais qui c'est ce gars et pourquoi
ça semble horrible (ou normal) qu'on lui demande de faire
ça ? »). Ceci étant, ça reste bien
écrit et attachant. Maintenant, comme je disais, c'est un
tôme de transition donc rien n'est conclut. On boucle quand
même sur de vrais cliffhangers horribles pour certains
personnages. Des choses se compliquent, d'autres avancent, et ça
prépare une seconde trilogie aussi tendue et complexe que la
première, mais quelle proportion en aurais-je oublié
d'ici-là, c'est la vraie question...
Lu. 1492. De Jacques Attali.
Oui, après Jack Lang, je lis Jacques Attali. D'aucuns ont
déjà commencé les remarques moqueuses et je ne
peux pas complètement leur jeter la pierre. Maintenant, je ne
regrette rien. De fait, toujours dans mes explorations de la
renaissance, je cherchais quelque chose de synthétique sur
l'ensemble du monde à l'époque, précisément
cette année-là, et on m'a conseillé Attali. De
fait, oui, c'était exactement ce que je cherchais. L'ensemble
est divisé en trois parties. Le avant, qui de manière
synthétique présente l'état du monde et le
pourquoi ce fut une année cruciale de plein de points de vue
(avec une approche centrée sur le fait que l'Europe a à
partir de là réécrit son histoire et celle du
monde autour d'elle), partie très éclairante et posant
pas mal de questions sur ce qui aurait pu se passer à la place.
Le pendant, qui est une chronologie détaillée des
évènements de l'année 1492, une mine
inépuisable d'idées en ce qui me concerne, mais qui peut
être un peu fastidieuse pour d'autres. Le après, qui
reprends les conséquences à court et moyen terme,
principalement de la découverte de l'Amérique et de la
diaspora des juifs espagnols : la naissance du monde intellectuel
moderne. Outre ce que j'y cherchais, et que j'ai parfaitement
trouvé, c'est un livre que je conseillerais volontiers aux
curieux d'histoire, parce qu'il analyse de manière engageante la
construction du monde moderne et de l'image que l'Europe a
d'elle-même, et ça, vraiment, ça ouvre à
plein de réflexions intéressantes (bien que pas toujours
joyeuses).
Joué. Iliade. De Dominique Erhardt.
Certains d'entre vous connaissent peut-être déjà
Dominique Erhardt, auteur de Condottiere et illustrateur du superbe
Medici, entre autres. Il s'agit de son dernier jeu, jeu de cartes sur
la thématique de la guerre de Troie. Le mécanisme central
est sensiblement semblable à celui de Condottiere, ce qui est
une très bonne base. Il s'en éloigne cependant
suffisamment pour mériter un nouveau jeu, voire
l'améliore puisqu'il résouds certains problèmes
récurrents de son prédécesseur (principalement la
durée des parties). Le jeu est plus tendu, plus fin et plus
rapide même si l'assimilation me semble un peu moins aisée
(il y a plus de cartes avec des pouvoirs spéciaux). Globalement,
oui, c'est condottiere en plus vicieux et plus rapide, donc très
très bien. Je trouve ça moins joli par contre, même
si les illustrations sont de très bonne qualité (juste
j'aime beaucoup le style peinture de Erhardt lui-même dans
Condottiere). L'ambiance fonctionne de fait très bien, on se bat
tous pour abattre Troie mais aussi beaucoup entre joueurs (ce qui
change nettement de Condottiere), on se croirait dans la guerre de
Troie pour de vrai. Donc oui, si vous n'avez pas Condottiere et que
vous voulez un jeu de cartes rapide et retors, c'est vraiment un jeu
qui mérite le détour. Si vous avez Condottiere et que
vous êtes fan aussi. Maintenant, si vous n'aimez pas condottiere
ou pas le thème, ça semble mal parti...
(Re) Joué. Six nimmt. De Wolfgang Kramer.
Six nimmt (Six qui prend en français) est un tout petit jeu de
cartes avec beaucoup de hasard et de suspense, qu'on peut
aisément ranger dans la catégorie des classiques du jeu
allemand. Le mécanisme de base est d'une simplicité
totale mais permet de jouer vite et avec n'importe qui. Les maniaques
du contrôle reprocheront une grande part de hasard, les autres se
feront plaisir à essayer de faire avec et à se faire
avoir régulièrement, principalement par la faute de leurs
petits camarades. Six nimmt reste un jeu abstrait, avec juste des
cartes et des numéros, mais comme on essaie de ne pas ramasser
de bêtes à cornes (qu'on aurait pu nommer points de
pénalité sauf que non), il arrive presque à se
créer une ambiance. Bref, un petit jeu qui mérite son
statut de classique.