Chroniques radicales, geeks et punks (à chien).


Lu. Etre radical, Manuel pragmatique pour radicaux réalistes. De Saul Alinsky.

Saul Alinsky est un écrivain et socioloque américain, décédé en 1972 et considéré comme le fondateur du mouvement de community organizing. Pour le dire rapidement, c'est un mouvement ayant pour objectif de former des community organizers, des personnes qui sauront former et organiser des communautés pauvres pour que celles-ci reprennent du pouvoir et aient un impact direct sur les politiques les concernant. Alinsky lui-même a beaucoup travaillé sur le terrain et été à l'origine de revendications importantes et efficaces aux Etats-Unis, mais surtout, dans une perspective de transmission de ce qu'il avait mis en place, il a formé et écrit sur ses expériences. C'est le coeur de cette nouvelle traduction d'un de ses ouvrages principaux : comment (se) former pour faire le boulot d'organisation de communautés, d'un point de vue personnel, par rapport aux communautés en question et à l'environnement politique en général. Et si l'ensemble est assez directement pratique, la dimension théorique et le recul pris sont importants et même vitales pour ne pas tomber dans une liste de recettes toutes faites. C'est donc un livre qui certes donne des pistes d'actions, mais surtout qui permet de réfléchir sur le font de ce que peut être l'action sociale et politique, et sur ses limites. Notamment, dans les questions que j'ai trouvées essentielles et bien traitées : comment donner à une communauté le pouvoir, et non le prendre et le manipuler en son nom ? Et comment se positionner par rapport aux questions éthiques, notamment quand elles s'opposent au pragmatisme politique et à l'efficacité ? C'est un livre facile à aborder mais très riche et solide qui reflette bien l'intelligence et la longue expérience d'Alinsky. Je ne peux que le recommander très fortement à tous ceux qui, professionnellement ou non, veulent agir dans le champ social ou politique de manière efficace et réfléchie (et réellement démocratique).


Lu. Ready Player One. De Ernest Cline.

Ready Player One est une apogée du roman geek, empli d'un bout à l'autre de références à la culture geek, et plus largement à ses origines dans les années 80. Pour ceux, donc, dont c'est la culture, c'est en soi un plaisir d'un bout à l'autre, une sorte d'orgie de clins d'oeils, bien choisis qui plus est, et replacés dans ce qu'ils ont aujourd'hui d'important culturellement. Et à part ça, c'est un très bon roman de quête dans un futur proche. Mais si vous n'appréciez pas les références geek, je ne suis pas sur que le reste fonctionne vraiment. Parce que même la trame de fond est une trame de référence geek : une chasse au trésor géante à travers des références geek des années 80, avec une résolution particulièrement maline, en ce qu'elle défends des valeurs des hackers/geeks des origines et du rapport à la réalité. Et, oui, il y aussi des personnages, du rythme, des rebondissements et des idées originales. C'est vraiment du très bon boulot, à tous points de vue, mais, comme je le disais en commençant, c'est tellement intégralement imprégné de culture informatico-ludico-geek qu'il faut quand même en avoir quelques notions pour entrer dedans (et sans doute un peu plus que ça pour en saisir la majorité des références). Donc, pour résumer : c'est un très bon bouquin et, pour les bons geeks, c'est un bonheur absolu à ne rater en aucun cas, une orgie de références et de clins d'oeil excessivement réjouissant sur une trame solide et bien menée.


Joué. Legend of Grimrock. De Almost human.

Oui, je sais, tout le monde joue à Diablo III. Moi pas, je trouve ça trop répétitif, mais du coup, la diablotterie actuelle m'a quand même donné des envies de jeu old-school. Et depuis que j'entendais du bien de Legend of Grimrock, j'ai craqué. Et je ne regrette pas du tout. Grimrock, déjà, c'est produit par un petit studio, vendu en direct et ça coute donc autour de 13 euros, euros qui reviennent directement à ceux qui ont fait le jeu, et ça me fait toujours plaisir. Pour ce prix-là, vous avez en plus une série de goodies qui ne font que souligner l'attachement du studio à son jeu et à ses références old-school (oui, une feuille de papier quadrillé par exemple, si vous voulez jouer en mode à l'ancienne, sans automap, en notant vous-même au fur et à mesure les couloirs (non, je ne l'ai pas fait, je ne suis pas un vrai de vrai)), et un jeu sans DRM. Bon, mais au-delà, de quoi s'agit-il ? D'un vrai dungeon crawler à l'ancienne (très très proche du mythique Dungeon Master, pour ceux qui situent). Vous controlez quatre personnages dans un donjon labyrinthique parsemé pour moitié de monstres et pour moitié d'énigmes et casse-têtes. Les combats sont tactiques et tendus et demandent d'être malin, mais pas autant que les énigmes, variées et astucieuses et raisonnablement indépendantes de la langue. Et j'apprécie cet équilibre qui fait qu'on est loin de passer son temps à taper des monstres en enfilade (et auquel s'ajoute des pièces cachées optionnelles nombreuses, pour ceux qui aiment fouiller partout et être encore plus malons). Accessoirement, il existe des difficultés variables au démarrage qui vous permettent de jouer en très hardcore ou avec des combats faciles pour vous concentrer plus sur les énigmes, mais en ce qui me concerne, le mode normal est équilibré parfaitement). La réalisation est de qualité, même si, soyons honnêtes, visuellement, ce sont des couloirs souterrains, donc bon, ils sont bien faits, mais ce n'est pas l'argument central, loin loin de là. Bref, vous l'aurez compris, Legend of Grimrock est un jeu très bien réalisé et très prenant, mais qui visent les joueurs old-school et les nostalgiques, dont je suis.

http://www.grimrock.net/


Vu. Le grand soir. De Gustave Kervern et Benoit Delépine.

Le grand soir est un grand film, et confirme à mes yeux l'amélioration constante du duo Kervern-Delépine. On y retrouve le grain de folie et d'irrévérence des opus précédents, la dimension punk et politique, plus visible sans doute mais pas forcément plus présente, et la poésie. La mise en scène est sobre, épurée, et met ainsi parfaitement en valeur le propos et les acteurs. Disons-le tout de suite, Poelvoorde et Dupontel sont excellents et donne vie à des rôles touchants et forts, et sont magnifiquement secondés par Brigitte Fontaine, notamment, et Bouli Laners (qui a pour moi le plus beau dialogue du film). Jouant deux frères, l'un étant le plus vieux punk à chien d'europe et l'autre un vendeurs de matelas dans un de ces zones commerciales qu'on trouve autour de toutes les villes. La zone commerciale est d'ailleurs quasiment un personnage, et la manière d'y montrer l'apathie omniprésente et la surveillance, omniprésente aussi mais inutile tant elle n'arrive pas à passer outre l'apathie justement, est une des forces du film. Face à cette zone normale donc, sécurisée et neutre, les deux frères vont essayer de sonner le réveil, de proposer autre chose. Mais non. Et ça n'empèche de finir de manière magnifique. Pas forcément optimiste, mais touchante et belle, et finalement motivante malgré tout. Un vrai propos de fond donc, amenè de manière un peu barge, très poétique. On rit, mais pas que, et pas sans arrières-pensées. Une nouvelle fois, je trouve que Kervern et Delépine réussissent une alchimie entre n'importe quoi drôle et propos politique et social fort, tout en y mélant références, clins d'oeil et moment d'anthologie incarnés par des acteurs remarquables et filmés avec beaucoup de finesse et de tendresse. Du cinéma qui a quelque chose à dire et qui réussit à le dire sans être chiant ni déprimant, c'est important, non ?


Vu. Game of Thrones, saison 2.

Dans la lignée de la première saison, donc, la seconde est maintenant terminée. Elle suit le second tome (anglais) de manière relativement fidèle. On retrouve la qualité globale que l'on avait pu constater dans la saison 1, voire un poil plus, puisqu'on a droit à quelques grosses scènes de bataille, des chevaux, etc. Le casting est toujours bon, les décors magnifiques et variés, bref, c'est drôlement bien réalisé. Et pour le reste... ben, c'est bien, mais j'ai du mal à me passionner pour, et je me demande en partie pour quoi. Sans doute parce qu'on retrouve la multitude de personnages du bouquin mais qu'on les connait et qu'on s'y attache moins puisque l'immersion est moindre et les séquences de chacun plus courtes. Sans doute aussi parce que même dans le bouquin, il y a de vraies longueurs et qu'elles se voient plus à l'écran. Et probablement aussi parce que je trouve que les changements faits par rapport aux bouquins, et qui visent je n'en doute pas à corriger notamment ce que j'évoquais il y a un instant, ne sont pas des plus convaincants, voire tombent un peu à plat. Je ne vais pas spoiler, mais les personnages et situations ajoutés me laissent dubitatifs (pour ne rien révéler de trop clair, et pour ceux qui ont suivi, ça concerne : Robb, Aria et Daenerys en particulier). Bon, je critique mais il y a de vrais bons moments, de bons dialogues (avec toujours Tyrion en superstar) et des scènes marquantes. Mais, d'une certaine manière, je trouve que ce qui faisait la force de la série en bouquin et la dstinguait de beaucoup de clichés et faiblesse du med-fan se perd un peu dans la série. Mais je continuerais à regarder sans hésitation, juste je ne vais pas non plus essayer de la vendre à tout le monde comme une série de référence.