Chroniques importantes, invisibles et augmentées.



Lu. Les mots sont importants. De Sylvie Tissot et Pierre Tévanian.

Les mots sont importants, c'est avant tout un blog, de réflexion et d'analyse du langage politique et de la politique en général, que je vous recommande très fortement. Plus qu'un travail de blog classique, il s'agit d'un travail d'analyse de fond, qu'on pourrait qualifier d'universitaire (mais lisible, je vous rassure), documenté, construit et solide. On y parle beaucoup de vocabulaire, mais aussi énormément de la construction de stéréotype et de justification de certaines politiques, particulièrement sur les questions relatives au racisme, au sexisme, discrimination en tout genre. Bref, de toutes les manières dont le discours construit une vision politique et l'impose de manière plus ou moins retorse et malhonnête. Ce qui est salvateur et passionnant. Et de ce blog a été tiré un livre, réécrit d'ailleurs, encore plus et mieux structuré et pensé, que je vous recommande plus que fortement. En effet, c'est une opportunité rare de profiter d'analyses de fond, militantes et très solides, quant aux politiques actuelles, et ce de manière lisible et très agréable. C'est divisé en parties thématiques, et ça se lit volontiers par petits bouts. Maintenant, vous êtes prévenus, ça ne met pas non plus que de bonne humeur, tant ça met en lumière les tendances racistes et discriminatoires de la société dans laquelle nous vivons et des politiques mises en place autant que de leurs relais dans les grands médias. A ne pas rater. Et en attendant, vous n'avez quà aller voir le blog (même si je trouve infiniment plus adapté à une lecture papier posé tranquillement) :

http://lmsi.net/


Lu. The girl who kicked the hornet's nest (Millenium III). De Stieg Larsson.

Enfin, Millenium III ! Ceux qui les lisent en français l'ont sans doute lu depuis un moment, pour les autres il est encore temps. En effet, la conclusion de la trilogie est très largement au niveau des deux précédents, un grand bonheur. C'est toujours bien écrit, fluide et plein plein de bonnes choses. On retrouve les personnages qu'on connait et qu'on aime pour la suite de leurs aventures. Dans la continuité directe du précédent, on va ici s'embourber plus profond dans le passé de Lisbeth et de son père, mais surtout des services secrets suédois et de leur dévoiement. En effet, il s'agit d'un roman d'espionnage plus que d'un roman policier, encore que je vous accorde que la différence soit discutable. Mais on est plus dans des intrigues politiques et les dérives de services secrets que dans des enquêtes policières, même si il y a aussi plein de rebondissements, d'enquête et de découvertes. Et de nombreux moments de bravoure dans la lignée des précédents. Tout cela mène à une vraie conclusion qui fait très plaisir et qui se construit progressivement. Bref, j'ai beaucoup beaucoup aimé et je vous recommande une fois de plus l'ensemble de la série, sans réserves.


Lu. This is not a game : you don't get a second life. De Walter Jon Williams.

Voilà des années que je n'avais pas lu Walter Jon Williams, qui avait commis il y a fort longtemps quelques bons romans de SF. Ici, pas vraiment de SF puisqu'on est dans un futur très proche, et qu'on explore les développements de la réalité augmentée. En effet, les protagonistes sont des organisateurs de jeux et évènements de réalité augmentée à grande échelle. La projection du développement de ces modes de jeu est en soi très amusante et intéressante, mais il n'y a pas que ça, loin de là. De fait, les personnages sont intéressants et attachants, mais surtout il y a un vrai scénario de thriller approfondi, avec des rebondissements, du suspense et une bonne exploitation des possibilités de la réalité augmentée et des réseaux de jeu social. Vraiment un roman prenant, très bien tourné sur un thème qui en plus me parle beaucoup.


Lu. Unseen Academicals. De Terry Pratchett.

Vous n'en avez pas marre que je vous dise du bien de Pratchett ? Parce qu'en ce qui me concerne, en fait, non. Un nouveau roman du Disque-Monde donc, sur le thème ce coup-ci du foot. Bon, ceci dit, c'est la trame de fond mais elle ne prend pas tant de place que ça, et on évite avec bonheur de reprendre une trame fantastico-monstresque de la ligné de celle de Soul Music ou de Moving Pictures. Sur cette trame de fond, on va donc se faire plaisir avec les habitants classique d'Ankh-Morpork, dont en priorité le Patricien (pour mon plus grand bonheur) et l'Académie (mais avec de nouveaux membres qui renouvellent avec bonheur le casting, et des clins d'oeil au fonctionnement universitaire renouvelés) mais aussi de nouveaux personnages. En particulier, le personnage principal, que j'ai trouvé très drôle et touchant, tout comme ceux et celles qui l'accompagnent. Des détours bienvenus également par les petites rues sordides et l'univers de la mode, qui valent tout à fait le coup. Tout ça avec du rythme, du souffle et plus de surprises et d'énergie que dans les précédents. Bref, une bien bonne cuvée qui donne envie que ça continue encore longtemps.


Lu. La mythologie du musée. De Bernard Deloche.

Mytho est une collection dans lequel un certain nombre d'auteurs reprennent l'approche de la mythologie moderne développée par Roland Barthes pour s'attaquer à des thématiques variées. Ici, donc, le musée. Et c'est assez fructueux, même si, pour ceux qui s'intéressent déjà au sujet, on ne découvre pas non plus de choses incroyables. Mais l'analyse du musée comme lieu d'uchronie, détaché des contingences historiques et surtout du présent et du temps réel, et comme lieu de construction artificielle d'une identité culturelle (nationale le plus souvent) est très intéressante. Les questions des objectifs du musée et de son utilisation politique sont non seulement bien abordés mais relativement accessibles. Et du coup, forcément, on passe en revue les tendances actuelles, mais plus si récentes, de la nouvelle muséologie, des éco-musées, et de la manière dont ils essayent donc de replacer le musée dans la vie réelle et dans le temps, avec toutes les conséquences politiques que ça a, entre autre. Bref, c'est vraiment pour les gens que ça intéresse mais ça fait une bonne synthèse et ça pose des questions essentielles et intéressantes.


Lu. Le Fait du Prince. D'Amélie Nothomb.

Autant certains romans d'Amélie Nothomb me marquent profondément, particulièrement ses romans biographiques, autant certains ne me laissent que peu de souvenirs. C'est malheureusement le cas du Fait du prince. Non que ce soit sans intérêt, il y a de bons moments, et un propos de fond qui fonctionne et qui m'a parfois touché et intéressé. Mais ça reste à mon sens assez superficiel et assez peu marquant, avec une fin facile et décevante. Bref, ça ne va quand même pas très loin. Bon, les fans liront sans douté quand même mais si vos créneaux de lecture ne sont pas très nombreux, vous pouvez sans doute l'éviter sans dommage.


Lu. Poête et paysan. De Jean-Louis Fournier.

Certes, comme le dit le bandeau, Jean-Louis Fournier est capable de tout, mais ce n'est pas dans ce roman-là qu'on s'en rend le mieux compte. Non que ce soit mauvais, notez bien, c'est même très agréable à lire et, comme toujours, écrit avec grâce et légèreté, teinté d'humour, mais ce n'est pas aussi marquant ni aussi fort que les précédents. De fait, il s'agit toujours d'autobiographie, mais cette fois-ci sur son épisode agriculteur. Par amour, il décide à cette époque de quitter ses études dans le cinéma pour devenir ouvrier agricole. Ce qu'il dépeins de son parcours et du monde agricole de l'époque est touchant, et drôle avec, comme à son habitude, des chapitres courts et rythmés, alternativement drôles et touchants. Bref, ça fonctionne et c'est une lecture très rafraichissantes, rapide et relaxante. Ceci étant, je conseille avant tout de lire les précédents, notamment les inoubliables « Où on va papa ? » et « Il a jamais tué personne, mon papa ». Si vous connaissez déjà, par contre, ça vous fera une lecture rapide et très plaisante, mais pas inoubliable.


Lu. 60 days and counting. De Kim Stanley Robinson.

J'ai découvert après l'avoir lu que ce roman était le troisième d'une trilogie, ce qui explique peut-être que je ne l'ai apprécié que de manière mitigée. Il s'agit d'un fiction de futur proche concernant le changement climatique et les catastrophes associées, vue depuis la Maison Blanche, occupée par un président progressiste et décidé à sauver le monde. Le fait est qu'on passe beaucoup de temps à suivre différents personnages, président et conseillers, dans leur vie et leurs doutes, mais aussi certains impliqués dans des histoires de complot politique et d'intrigues d'espionnage. Ce qui, au final, m'a assez peu convaincu puisque je n'étais pas si attaché aux personnages et que ça détourne du coup beaucoup du sujet principal du livre. Ce n'est pas du mauvais boulot mais ça m'a laissé assez sceptique au final.


Lu. Snuff. De Chuck Palahniuk.

Palahniuk aime bien les thèmes provocants et en faire des tonnes. Ici, un court roman sur un thème effectivement provocant : une star du porno sur le retour décide de tirer sa révérence en tournant le gang-bang record du monde. Elle compte donc coucher avec 600 hommes et en mourir, on découvrira ensuite pourquoi elle espère en mourir. On suit l'évènement par le regard de quatre personnages : trois hommes attendant leur tour et la jeune femme chargée de l'organisation. Ce fonctionnement à trois voix fonctionne bien, avec de nombreux rebondissements et une plongée assez glauque dans les attentes et passés des personnages (oui, il en fait des caisses, dans le glauque et choquant souvent, mais non sans à propos et sans contenu). Et en prime, il y a un vrai scénario, une vraie progression, avec une conclusion amusante, dans le style trash. Ce n'est pas à mon sens le meilleur de Palahniuk, de loin, mais si on supporte le coté trash et provoc, c'est un petit roman original et bien tournée.